Les sept contre Thèbes - Eschyle

Publié le par sophie


LE CHOEUR. - O noire, ô toute puissante Imprécation
d'Oedipe et de sa race, un froid cruel enveloppe
mon coeur. J'entonne le chant dû au tombeau, dans un
délire de Thyade, quand j'apprends quels sanglants
cadavres viennent de tomber, misérablement. Elle est de
sinistre augure, cette rencontre de lances!
     Elle a été au but sans défaillance, la parole qui portait
le voeu d'un père; l'indocilité de Laïos a prolongé
ses effets. Et une angoisse étreint la ville: les oracles ne
s'émoussent pas! Ah! lamentables guerriers, vous avez
accompli ce qu'on n'eût osé croire! Voici donc venus de
pitoyables malheurs, il ne s'agit pas de vains mots!

      Voilà qui parle assez clair: nos yeux voient le récit
du messager. Des deux guerriers, objets de notre double
angoisse, les tristres meurtres fratricides, les deux lots de
douleurs sont donc là, achevés. Que dire? oui, que dire,
sinon que des souffrances après des souffrances viennent
prendre place au foyer de cette maison? Allons,
mes amies, qu'au vent des sanglots vos bras battent
autour de vos fronts l'entraînante cadence de nage qui
de tout temps, à travers l'Archéron a su faire passer la
lourde nef aux voiles noires, avec ses pélerins, jusqu'à
la rive ignorée d'Apollon, la rive sans soleil, hospitalière
et ténébreuses!

Eschyle
, in Les belles Lettres, trad. de P. Mazon

Publié dans Littérature

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article